Plonger dans la nature, enlacer un arbre, respirer… Depuis que le professeur Miyazaki a démontré scientifiquement les bénéfices de la sylvothérapie sur l’esprit et le corps, un millier de thérapeutes reçoivent les citadins stressés pour des sessions en pleine forêt où les cinq sens sont sollicités.
Lorsque Nagisa Ono accompagne des groupes dans les massifs du Japon pour des bains de forêt, elle ne s’attarde pas sur le nom d’une plante, d’un ruisseau, le mode de vie d’un animal ou la suite du parcours. Elle préfère, au gré du chemin, laisser ses patients se perdre et se retrouver. « L’essentiel n’est pas la forêt, dit-elle, mais la santé des participants. J’essaye d’établir un lien entre chacun et la forêt, d’aider à percevoir et à réagir. » Tel est l’intime secret des « bains de forêt », ou shinrin yoku en japonais. Une pratique relativement répandue au pays du Soleil-Levant, qui consiste à se promener en milieu boisé en prêtant attention à son environnement, aux bruits, aux odeurs, aux chants des oiseaux. Une forme de méditation sylvestre, encadrée par des « thérapeutes de la forêt » formés et certifiés, à l’image de Nagisa Ono, 32 ans.
Photos à l’appui, la jeune femme raconte ses activités au milieu des arbres. Broyer une feuille entre ses doigts puis la porter à ses narines. S’allonger dos au sol et réapprendre à respirer. Enlacer un tronc d’arbre ou, adossé à lui, regarder les rayons du soleil miroiter à travers les frondaisons. « Je propose de réveiller des sens que nous n’utilisons plus quand nous vivons en ville. J’ai croisé tant de personnes qui n’avaient pas touché la terre depuis plus d’une vingtaine d’années ! »
L’idée a germé un jour dans l’esprit d’un directeur de l’Agence nationale des forêts. Puisqu’il existe des bains de mer (kaisui yoku) et des bains de soleil (nikkou yoku), pourquoi ne pas lancer les bains de forêt (shinrin yoku) ? En 1982, Tomohide Akiyama incite les Japonais à s’aventurer sur les sentiers. Après tout, c’est une juste reconquête du territoire puisque les forêts ne couvrent pas moins de 67 % de l’archipel. Et le fait de passer du temps dans la nature ne peut qu’être bénéfique pour l’esprit et le corps. « Mais aucune donnée scientifique ne venait étayer ses propos qui relèvent du simple bon sens », souligne Yoshifumi Miyazaki, de l’université de Chiba. […]
Par rafaële brillaud